L’explication au f final de clef est simple : le mot clé est issu du latin clavis, on peut facilement expliquer le f par des raisons phonétiques.En faisant quelques recherches, j’ai trouvé cette brève mais adéquate explication, et le caractère étymologique de cette dernière m’a donné envie d’aller voir quels pouvaient être les mots issus de la même racine que clé. Comme vous le constaterez, ils sont nombreux.
Sans rentrer [sic] dans les détails, la syllabe finale chute lors de l’évolution du latin vers l’ancien français, le a tonique s’affaiblit en e tonique et le v alors en finale absolue du mot devient son équivalent sourd : le f. D'où clef.(1)
racine latine clau-/clav- : idée de fermeture.Ainsi, on constate que la racine clau- nous a donné de nombreux mots témoignant d’une idée de «fermeture». Pour ma part, j’ai été étonnée de découvrir la liste des termes suivants : conclusion, exclusion, inclusion, occlusion, perclusion, réclusion, tous liés par leur sens et tous construits de la même base morphologique (-clu-).
Le nom latin clavis a naturellement évolué en clef, puis clé. Clavis avait à l’origine un synonyme clavus, qui a, quant à lui, évolué en clou.
Au début, les deux noms désignaient la même chose : les premières serrures romaines étaient en effet composées, le plus simplement du monde, de deux anneaux dans lesquels on passait une cheville ou un clou. Mais les serruriers romains ont peu à peu raffiné, et une distinction s’est faite entre une clavis qui ressemblait de plus en plus à une clé, et un clavus, qui restait toujours un clou.(2)
CLÉ ou CLEF ensemble de mots latins se rattanchant à une base clau- exprimant l’idée de «fermer».
1) clavis «clef»; diminutuf clavicula
2) clavus «clou»; diminutif clavellus; le mot clavus a aussi désigné un ornement, nœud de pourpre ou d’or sur un vêtement, d’où, par extension, la bande de pourpre, plus ou moins large selon le rand des personnages, qui bordait, à Rome, la toge des sénateurs ou des chevaliers; laticlavus «bande large»; angusticlavus «bande étroite»
3) claudĕre, clausus, «fermer» d’où dérivent les substantifs :
a) claustrum et surtout plur. claustra «fermeture», «barrière»; d’où latin médiéval claustralis et claustrare;
b) clausura «fermeture», «lieu bien fermé», remplacé en latin vulgaire par *clausĭtūra et *clausio;
c) clausula «conclusion», remplacé en latin médiéval par clausa
4) en composition, le verbe clausere prenait la forme clūdĕre, -clusus; d’où concludere «fermer», «finir», «conclure»; excludere «ne pas laisser entrer»; includere «enfermer»; occludere «fermer»; percludere «obstruer»; recludere qui signifiait «ouvrir» en latin classique mais a pris en latin vulgaire le sens de «fermer»; en latin vulgaire s’est formé de plus le verbe *cludiniāre «cligner», «fermer l’œil à demi».
I. FAMILLE DE clavis ET clavus
A. clavis
1. clé ou clef, porte-clef;
2. cheville, cheviller, chevillard «marchand qui vend la viande à la cheville, c.-à-d. dépecée, accrochée à des chevilles».
B. clavus
1. clou, clouer, déclouer, reclouer, clouter, cloutier, clouterie;
2. clafoutis «gâteau composé d’une couche de fruits, recouverts d’une pâte liquide qu’on fait prendre au four», mot issu du crousement de foutre et claufir : latin clavo figere «fixer avec un clou».
C. BASE -clav-
1. claveau «maladie des moutons caractérisée par des pustules purulentes»;
2. glaviot «crachat», glaviotter;
3. clavelée «variole du mouton»;
4. clavier, clavette, claviste;
5. claveau (d’après clef-de-voûte);
6. enclaver «enfermer sous clef», enclave, enclavement;
7. clavecin «cymbale à clefs» c.-à-d. «à clavier»;
8. clavicule;
9. laticlave «tunique à bande large»;
10. conclave «(chambre) fermée à clef»;
11. autoclave «qui se ferme de lui-même».
II. FAMILLE DE claudere
A. BASE -clo-
1. clore, enclore, éclore «ouvrir», forclore;
2. clos, closerie, enclos, éclosion;
3. clôture «arrêt définitif», clôturer;
4. clovisse.
B. BASE cloi-
1. cloison «clôture», cloisonnage, cloisonné, cloisonner, cloisonnement;
2. cloître, cloîtrer,
C. BASE cli-
cligner, clignement, clin, clignoter, clignotement, clignotant.
D. BASE -clu-
1. conclure «enfermer», «convaincre d’une faute», «décider», «terminer», exclure, inclure;
2. écluse «(eau) séparée (du courant)», écluser, éclusier;
3. cluse «fermée»;
4. reclus, perclus, inclus;
5. conclusion, conclusif;
6. exclusion, exclusif, exclusive, exclusivisme, exclusivité;
7. forclusion;
8. inclusion, inclusif, inclusivement;
9. occlusion, occlusif, occlusive;
10. réclusion.
E. BASE clau-
1. claustral, claustration, claustrer;
2. clause «vers»;
3. clausule;
4. claustrophobie, claustrophobe;
5. claustra «cloison ajourée».(3)
Toutefois, pour en revenir à notre questionnement initial, toutes ces informations étymologiques ne nous expliquent pas clairement pourquoi on demeure encore aujourd’hui avec deux graphies plutôt qu’une seule, pour le même mot. Profitons alors de cette liberté orthographique, par opposition au caractère habituellement contraignant de notre belle langue française et ses nombreuses règles! :)
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NB : Les formes précédées d’un astérique (*) sont des formes latines reconstituées, qui n’ont pas été attestées dans les textes.
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(1) Site Web Pourquois.com
(2) [GARRUS, René (2005). Les étymologies surprises. Éditions Belin, Paris.]
(3) [PICOCHE, Jacqueline (2008). Dictionnaire étymologique du français. Dictionnaires Le Robert, Paris.]
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