mercredi 22 février 2012

La vie avant d’être lauréat

Avec tous ces galas qui ont lieu depuis quelques semaines, j’en profite pour tenter de démêler les usages acceptés ou non des mots tels nomination, nominé et nommé.

NOMINER
«Anglicisme pour mettre en nomination, recevoir une nomination, sélectionner(1)
«v. t. (de l’angl. to nominate, proposer). [Anglic. déconseillé] Sélectionner des personnes, des œuvres pour un prix, une distinction.»(2)

NOMINÉ, ÉE
«adj. ANGLIC. Dont on a cité le nom, le titre, pour être digne d’un prix (en parlant d’une personne, d’une œuvre). Recomm. offic. sélectionné.»(3)

NOMINATION
«n. f. […] 2. Mention.»(1)
«n. f. […] 3. Le fait d’être nommé (dans une distribution de prix, parmi les lauréats d’un concours). ⇒ mention(3)

La nomination implique donc clairement le sens d’«avoir obtenu le prix». «En français, nomination […] désigne alors une distinction, après les prix et les accessits(a), dans les concours. Il s’agit donc dans ce cas d’une récompense en soi et non du fait d’être sélectionné parmi les candidats à un prix [...].»(4)

NOMMÉ
«adj. […] II. Désigné, choisi par nomination.»(3)
Les nommés sont…

Le substantif nommé ne figure pas dans les dictionnaires. De même, l'anglicisme nominé n'est pas recommandé, bien qu’il figure dans certains dictionnaires. On dira d’un artiste en lice pour un prix qu’il est sélectionné pour un prix. Il est aussi possible de dire qu’un film, un disque ou un livre est sélectionné pour un prix ou qu’il fait l’objet d’une sélection pour un prix. Enfin, quand le processus de sélection comporte plusieurs étapes, il est pertinent de dire qu'un candidat est finaliste.

Nota : La locution en nomination, qui a longtemps été critiquée, est maintenant passée dans l'usage.(5)
Toutefois, malgré que la plupart des dictionnaires et références récents déconseillent l’emploi de nominer, comme nous venons de le voir, un ouvrage semble l’accepter, dans le contexte bien précis de remises de prix artistiques :
NOMINER
emploi et sens Ce verbe, calqué sur l’anglais to nominate, a été répandu dans le monde du spectacle, pour signifier «mentionner (le nom d’un film ou d’un acteur) dans une présélection avant l’attribution des oscars ou des césars». Très critiqué, ce mot est cependant bien formé et acceptable dans un contexte précis, car ni nommer ni sélectionner ne lui correspondent vraiment… On se rappelera qu’auditionner, réceptionner, etc., aujourd’hui admis par l’usage, ont été formés dans le même esprit, en dépit de la préexistence d’entendre et de recevoir.(6)
Cette dernière référence nous démontre un principe propre à toute langue : une langue évolue, change et s’adapte à ses usages (et donc, à ses usagers).

Ainsi, bien que pour l’instant, il nous soit généralement prescrit d’éviter le verbe nominer au sens de «sélectionner» ou «mettre en nomination» pour recevoir un prix, on peut toutefois croire que dans un proche avenir, cet usage sera accepté et jugé correct.

En attendant, suivez plutôt les conseils de notre ami linguiste Guy Bertrand. :)

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(a) ACCESSIT
«n. m. Distinction honorifique accordée aux lauréats les plus proches du premier prix[.]»(2)
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(1) [DE VILLERS, Marie-Éva (2007). Multidictionnaire de la langue française, 4e édition. Éditions Québec Amérique inc.]
(2) [Le petit Larousse illustré 2012, édition limitée, éditions Larousse, Paris.]
(3) [ROBERT, Paul (2004). Le nouveau Petit Robert. Paris.]
(4) Banque de dépannage linguistique de l’Office québécois de la langue française
(5) BERTRAND, Guy. Le français au micro.
(6) [COLIN, Jean-Paul (2006). Dictionnaire des difficultés du français. Éditions Le Robert, collection Les usuels, Paris.]

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